Située dans le 7e arrondissement de Lyon, la librairie libertaire La Gryffe existe depuis 1978. Parce qu’elle s’oppose à toute forme d’oppression, la Gryffe est ouverte à toutes les luttes de libération, aussi minoritaires et particulières qu’elles puissent être. Elle est gérée par un collectif exclusivement constitué de militant·es, sans salarié·es ni permanent·es.

Ce qui unit le collectif

À l’étatisme du droit, la Gryffe oppose un fonctionnement fondé sur l’affinité, le consensus et plus largement sur un projet autogestionnaire.

L’affinité, comme sensibilité et comme projet communs, repose sur le refus des chef·fes, de la hiérarchie, de l’autorité, de toute soumission à une volonté extérieure et de toute forme d’appropriation privée ou individuelle de notre force collective.

Le consensus ou le refus du vote et de la démocratie représentative. Avec le consensus, il s’agit d’aller au fond des choses, de convaincre les autres ou d’être convaincu·e par eux, de prendre le temps de se mettre d’accord, d’élaborer des compromis ou, au pire, en cas de graves ou d’immédiates divergences, de se retirer provisoirement ou durablement du collectif.

L’autogestion suppose des activités collectives dans la prise en charge des tâches de gestion de la librairie : répartition et tenue des permanences, commandes de livres, retours des livres aux distributeurs, organisation matérielle des débats, entretien et ménage. Dans certains cas, le collectif peut confier des mandats provisoires à certain·es membres pour la réalisation de tâches spécifiques (comme l’organisation d’un débat, une représentation, etc.).

Dans sa raison d’être, dans le choix des livres, brochures, revues, journaux qu’elle diffuse  ; dans les débats  ; dans les prises de position individuelles et collectives, la Gryffe est étroitement liée au mouvement libertaire, aux mouvements sociaux et aux luttes d’émancipation qu’elle s’efforce de faire connaître, de deux manières : 

1 – Historiquement, à travers la diffusion de livres sur des expériences collectives aussi importantes que la Première Internationale, la Commune de Paris, la révolution mexicaine, la révolution russe, la révolution et l’anarchisme espagnols, la révolution hongroise de 1956 et plus largement, l’ensemble des mouvements révolutionnaires, regroupés sous les noms de syndicalisme révolutionnaire, d’anarchosyndicalisme et de conseils ouvriers.

2 – Théoriquement et pratiquement, à travers la diffusion de livres, brochures, fanzines et l’organisation de débats sur tous les mouvements et les idées permettant de dénoncer, lutter contre toutes les formes de domination et d’oppression et d’agir directement, sans représentant·es ni intermédiaires.

Cette ouverture et ce soutien aux différentes raisons de se révolter (hiérarchie, autorité, capitalisme, impérialisme, patriarcat, racisme, fascisme, sexisme, souffrance animale, etc.) ne relèvent pas de considérations éclectiques ou commerciales. Dans le projet mis en œuvre par la Gryffe, l’ouverture et le soutien aux luttes pour la liberté et l’égalité quelles qu’en soient la raison et les effets tiennent au projet même du mouvement libertaire. Car ces luttes, chaque fois singulières, permettent une transformation en forces collectives et révolutionnaires contribuant à embrasser tous les aspects de la vie humaine.

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La Gryffe dans les années 80 

Comment fonctionne La Gryffe ?

Une réunion hebdomadaire permet de traiter les affaires courantes, tandis que des assemblées générales sont l’occasion de débats plus approfondis sur les orientations et le fonctionnement de la librairie.

Toute décision, initiative ou prise de position engageant la librairie exige, après communication à l’ensemble du collectif, l’accord ou la neutralité bienveillante de ses membres :

– par simple information pour les décisions urgentes et les plus évidentes ;

– par la réunion hebdomadaire pour les décisions concernant les permanences de la semaine, les débats prévus, les « tables de presse » extérieures, le prêt de la salle du fond, etc.  ;

– par les AG pour les décisions engageant les orientations et le fonctionnement de la librairie.

Dans le cadre officiel et légal exigé par l’ordre existant, le collectif de la librairie obéit à la loi associative dite de 1901. Mais – fait déterminant, – ces statuts exigés par l’État n’ont jamais, depuis plus de quarante ans d’existence, joué le moindre rôle dans le fonctionnement de la librairie. Le collectif est ouvert à toute personne se reconnaissant dans ces valeurs et ce fonctionnement.

Dans les années 80, la revue IRL avait publié cet article sur la librairie La Gryffe.